L'évolution du pèlerinage et des pèlerins au cours des vingt dernières années

Au point de vue nombre et sexe	En 2005	En 2024
Nb total de pèlerins	93.923	497.177
NB d’hommes (en % du total)	59,31 %	46,03 %
Nb de femmes (en % du total)	40,69%	53,97 %

Le nombre de pèlerins et pèlerines recensés à Compostelle augmente régulièrement, il quintuple en 20 ans.

D’autre part, la répartition par sexe se modifie fondamentalement : les pèlerines, minoritaires en 2005, dépassent en nombre les hommes depuis 2018 et cet écart va en s’accroissant.

Autre évolution : la nationalité des pèlerin.e.s. : les Espagnols restent toujours largement majoritaires, mais diminuent en pourcentage du fait de l’augmentation du nombre de pays représentés. Les U.S.A. deviennent le 2^ème pays le plus représenté et les Coréens qui étaient absents en 2005 arrivent actuellement en 10^ème positions.

L’étude des points de départ des pèlerins montre que de 2005 à 2024, la proportion de pèlerins, ayant marché la distance minimale pour obtenir la « credencial », a fortement augmenté, passant de 23 % à 56 %. En 20 ans, cette proportion est devenue 2,5 fois plus importante !

On est en droit de se poser la question : Que deviendrait le pèlerinage à Compostelle si l’on devait supprimer la Compostela ?

Cette question n’est bien sûr pas à l’ordre du jour et ne le sera, je crois, jamais, car elle touche une question sous jacente : l’argent.

Ainsi une lettre récente (1) de la Xunta de Galicia aux associations jacquaires, les félicite pour le travail de promotion du chemin qu’elles ont accompli et les encourage à continuer dans l’avenir. Résumé et formulé ainsi, il n’y a rien à redire. Mais une analyse plus détaillée du discours porte à réflexion.

Une première phrase est très claire : « Le gouvernement galicien accorde des subventions aux personnes et aux organisations qui se démarquent pour le travail exceptionnel qu’ils ont accompli au profit de notre région ». Dans cette phrase aucune ambigüité n’est présente : on remercie les associations, car elles ont contribué au développement de la région et pour cela on les subventionnera. (Il reviendra aux associations jacquaires de décider si elles souhaitent se laisser payer pour leur action en faveur du développement de la région de Galice.

Les tableaux suivants présentent clairement l’évolution dans le choix des chemins empruntés :

Les deux chemins principalement suivis sont le camino « Francés » et le camino « Portugués », mais l’évolution de leur fréquentation suit des courbes inverses : le % des pèlerin.e.s empruntant le camino « Francés » diminue de manière rectiligne, passant de 85 % à 47 %, tandis que sur les caminos Portugués, il augmente régulièrement passant de 6 % à 34 % au cours des 20 années. A eux deux, ils totalisent 81 % du total des pèlerins recensés.

Les caminos « Inglès » et « Primitivo » complètent le tableau des pèlerinages courts.

Le nombre de départ en serait d’après Francebleu d’environ 35.000 par an (2). Selon la mairie de Malzieu-ville, ce nombre serait de 30.000 (3). En 2023, environ 20.000 pèlerins auraient assisté à la messe des pèlerins à la Cathédrale (4). Cette fourchette, assez étendue, montre qu’un chiffre précis est difficile à donner, mais que le nombre de « pèlerins » au départ du Puy est très important.

Un tel engouement pour le chemin du Puy s’explique par de bonnes et par de moins bonnes raisons.

Une première raison est, sans conteste, le fait que ce chemin traverse de très belles régions et offre un très beau patrimoine architectural et de magnifiques paysages. Ce n’est pas pour rien que parmi les 4 grands chemins de France, il est le premier à avoir été balisé en tant que GR 65 et à voir paraître le premier topoguide « Le Puy-Conques » dès 1972.

Les autres raisons de cet engouement pour ce chemin sont, d’une part, le battage publicitaire qui le présente comme étant LE chemin vers Saint-Jacques en France et d’autre part, tous les services qui se sont mis en place pour attirer le touriste (dont le Compostel’bus qui fait la navette journalière entre Le Puy et Conques pour ramener les randonneurs à leur lieu de départ) .

Plutôt que de 30.000 pèlerins, il faudrait parler d’un très grand nombre de touristes-randonneurs et d’un très petit nombre de pèlerins.

Y a-t-il une évolution dans le temps de cet engouement ? Aucun nombre de pèlerins partant du Puy en 2005 n’est accessible, par contre, on connait le nombre arrivant à Compostelle au départ du Puy :

	En 2005	En 2024
Nb de pèlerins français recensés à Compostelle	5.910 soit 6,29 % du total	10.704 soit 2,14 % du total
Nb recensés étant partis du Puy	2.241 soit 2,39 % du total	3.091 soit 0,65 %

Le nombre de pèlerins français recensés à Compostelle, quoiqu’en augmentation, diminue fortement en proportion du nombre total de pèlerins.

Le nombre de pèlerins, recensés comme ayant comme point de départ le Puy-en-Velay, est en légère augmentation, mais chute très fortement lorsqu’il est exprimé en % du nombre total de pèlerins.

Actuellement, au vu des chiffres, seulement 10 % des marcheurs partant du Puy vont à Compostelle, les autres, randonnent sur un chemin très fourni en service divers. Certains d’entre eux se découvriront peut-être une vocation de pèlerin.

De plus en plus, le simple guide en papier est accompagné, sinon remplacé, par des applications diverses sur téléphone portable : trace GPX, Miam Miam Dodo en version numérique, « Buen Camino » presque plus complet que n’importe quel guide… le balisage devient presque obsolète !

Le pèlerinage devient une randonnée très organisée : réservation des logements, des repas, de transports éventuels pour raccourcir une étape, point relais pour une petite collation à mi-parcours…on parle actuellement de « turigrinos ».

Mais, en définitive, parmi nos prédécesseurs pèlerins des siècles passés n’existaient-ils pas aussi, à côté du manant cheminant à pied avec une bourse légère, des pèlerins à la bourse bien remplie accompagnés de leur valetaille et accomplissant eux, leur pèlerinage en recherchant bien plus de confort et de sécurité …!?

2. Depuis 2018, les femmes pèlerines recensées à Compostelle sont plus nombreuses que les hommes.

3. Les USA deviennent la nation étrangère la plus largement représentée sur les chemins.

4. Le camino «Francès» perds son statut de chemin le plus fréquenté au profit des « caminos Portugués ».

5. Les pèlerinages courts (minimum requis pour l’obtention de la « Compostela » deviennent de plus en plus nombreux.

6. En France, le chemin du Puy-en-Velay est parcouru par de plus en plus de marcheurs.

7. La majorité de ces marcheurs ne vont pas à Compostelle et sont donc plutôt des randonneurs.

8. Les aides de toutes sortes aux pèlerins peuvent rendre le pèlerinage de plus en plus facile et confortable.

9. Ceci entraîne une diversification des types de pèlerins et pèlerines (« peregrinos » et « turigrinos »).

(1) En ligne sur la page Face Book de l’ « Association belge des Amis de Saint-Jacques de Compostelle » : https://www.facebook.com/