Article paru
dans la revue
de l'Association Belge des Amis de
Saint-Jacques-de-Compostelle,
"Le Pecten ", n°
104, pp. 8-9
par Pierre Swalus
Pourquoi avons-nous choisi en 1990, pour
notre premier chemin vers Compostelle la voie de Vézelay ?
[1]
Probablement d’abord parce que nous avions
lu en 1982 le livre « Priez pour nous à Compostelle » des deux
journalistes Pierre Barret et Jean-Noël Gurgand qui avaient emprunté ce
chemin en 1977, aussi parce que la Basilique
Sainte-Marie-Madeleine était un haut lieu de pèlerinage au Moyen-âge et
que Aymeric Picaud, auteur présumé d’une partie du Codex Calixtinus
appartenait au prieuré de Vézelay.
Malgré le fait qu’en 1990, la via
Lemovicensis n’était, contrairement à la voie du Puy-en-Velay, ni
balisée, ni décrite dans aucun guide, il nous semblait évident que
c’était par ce chemin qu’il nous fallait aller à Compostelle.
Nous n’avons pas été gênés par la foule
des pèlerins ! Depuis la Belgique jusqu’à Ostabat nous n’avons rencontré
que 2 fois d’autres pèlerins… Mais nous avons malgré tout fait de belles
rencontres.
Nous pensons particulièrement à notre
rencontre avec sœur Annie à La Souterraine.
La veille, nous campions à Crozant. Nous
avions fait nos courses à l’épicerie du village où l’épicière nous avait
interrogés sur notre pèlerinage. Le soir, au camping sous la pluie, une
voiture s’arrête devant notre tente. C’est l’épicière qui nous apporte
sur un papier l’adresse de sœur Annie à La Souterraine et qui nous dit
qu’il est certain qu’elle nous accueillera pour la nuit.
Le lendemain, vers 11 h. nous nous arrêtons dans un café. Nous avions
déjà été repérés sur la route par 2 ouvriers qui buvaient un verre au
bar : les deux marcheurs au parapluie. Eux aussi nous interrogent sur
notre cheminement et nous disent eux aussi « Allez chez sœur Annie »…
Et nous y sommes allés et avons été
accueillis avec chaleur et nous avons beaucoup échangé.
Il y a 20 ans sa
congrégation demande à ses religieuses qui le peuvent d’aller vivre dans
les communautés paroissiales. La France est fort démunie au niveau
clergé et dans une paroisse, une religieuse peut assumer beaucoup de
tâches. Elle quitte donc le cocon de la communauté. Pour assurer son
autonomie financière, elle reprend sa profession d’infirmière et donne
des cours de yoga. Quand elle sera plus âgée et incapable d’être
autonome elle ira à l’hospice, « comme tout le monde » dit-elle…
Sa petite maison est pratiquement au pied de l’église. En plus de son
travail d’infirmière, elle assure dans sa paroisse, différentes tâches :
enterrements, catéchèse, animation liturgique, théologique.
Son engagement social amène le parti socialiste à lui demander si elle
ne veut pas se mettre sur leur liste pour les élections municipales…
Son évêque, consulté, l'y autorise et elle devient conseillère
communale. Elle nous dit en riant « Depuis lors certains bons
paroissiens ne font plus appel à moi pour leur piquer les fesses ! »
Elle a un impact très
grand sur les plus démunis. Sa vie est réellement conforme à
l’évangile. Ce témoignage nous fait du bien et sœur Annie. en peu de
temps devient une amie… que nous devons quitter le lendemain matin,
mais que nous reverrons encore quelques années plus tard.
Le lendemain, nous
logeons au refuge pour pèlerins de Bénévent-L’abbaye. Ce refuge dû à
l’initiative du Dr. Conquet et « sponsorisé » par la firme Shell est
pratiquement le seul sur notre chemin avant Ostabat.[2]
Quelle n’est pas notre surprise
quand une religieuse nous apporte des œufs et une bonne soupe fraiche.
C’est une consœur de sœur Annie, qui travaille ici dans un home pour
personnes âgées et qui a été prévenue par elle de notre passage !
Sœur Annie reste
vivante dans notre souvenir.
[2]
Les sites internet donnant des listes d’hébergements pour
pèlerins sur la voie de Vézelay et ses différents chemins
d’accès y compris depuis la Belgique pet être trouvée sur
https://verscompostelle.be/