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LA « GRANDE CHANSON » DES PÈLERINS DE SAINT-JACQUES.

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LA « GRANDE CHANSON » DES PÈLERINS DE SAINT-JACQUES.

 

La « grande chanson » des pèlerins existe en différentes versions. Denise PÉRICARD-MÉA en recense 5 dont la plus ancienne date du début du XIVème (1).

La plus connue, dont le texte est présenté ci-dessous, date elle, du XVIème-XVIIème. L’itinéraire qu’elle décrit  se trouve dans « Guide qu'il faut tenir pour aller au voyage Saint-Jacques en Galice » (2).

Le texte provient du livre d’Alexis SOCARD, Noëls et Cantiques imprimés à Troyes, 1865 (3).

 

 

 

1 Quand nous partîmes de France                  (Île-de-France)(5),

  En grand désir,

  Nous avons quitté père et mère,

  Trist' et marris;

  Au cœur avions si grand désir,

  D'aller à Saint-Jacques,

  Avons quitté tous nos plaisirs,

  Pour faire ce voyage.

 

     Refrain

  Nous prions la Vierge Marie,

  Son fils Jésus,

  Qu'il plaise nous donner

  Sa sainte grâce,

  Qu'en Paradis nous puissions voir

  Dieu et M. Saint-Jacques.

 

  2. Quand nous fûmes en la Saintonge,

  Hélas mon Dieu,

  Nous ne trouvâmes point d'églises,

  Pour prier Dieu;

  Les Huguenots les ont rompues,

  Par leur malice,

  C'est en dépit de Jésus-Christ,

  Et la Vierge Marie.

 

  3. Quand nous fûmes au port de Blaye,

  Près de Bordeaux,

  Nous entrâmes dedans la barque,

  Pour passer l'eau;

  Il y a bien sept lieues par eau,

  Bonnes me semble,

  Marinier passe promptement,

  De peur de la tourmente.

 

  4. Quand nous fûmes dedans les Landes,

  Bien étonnés,

  Avions de l'eau jusqu'à mi-jambes,

  De tous cotés;

  Compagnons nous faut cheminer,

  En grandes journées,

  Pour nous tirer de ce pays

  De si grandes rosées.

 

  5. Quand nous fûmes à Bayonne,

  Loin du pays,

  Nous fallut changer nos couronnes

  En fleur de lys;

  C'était pour passer le pays

  De la Biscaye,

  C'était un rude pays à passer,

  Qui n'entend pas le langage.

 

  6. Quand nous fûmes à Sainte-Marie,           (Sainte-Marie d’IRUN)(6)

  Hélas! mon Dieu!

  Je regrettois la noble France,

  De tout mon cœur;

  Et j'avais un si grand désir

  D'être auprès,

  Aussi de tous mes grands amis,

  Dont j'en suis en malaise.

 

  7. Quand nous fûmes à la montagne             (tunnel San Adrian)            

  Saint-Adrien,

  Au cœur me vient une pensée

  De mes parens;

  Et quand ce vient au départir

  De cette ville,

  Sans dire adieu à nos amis,

  Fîmes à notre guise.

 

  8. Entre Peuple et Victoire,              (Pampelune et Vitoria)(6)

  Fûmes joyeux,

  De voir sortir des montagnes

  Si grande odeur;

  De voir le romarin fleurir,

  Thym et lavande,

  Rendîmes grâces à Jésus-Christ,

  Lui chantâmes louanges.

  

9. Quand nous fûmes à Saint-Dominique,     (Santo Domingo)(6)

  Hélas! mon Dieu!,

  Nous entrâmes dedans l'église,

  Pour prier Dieu;

  Le miracle du pèlerin,

  Par notre adresse,

  Avons ouï le coq chanter,

  Dont nous fûmes bien aise.

 

  10. Quand nous fûmes à Burgue, en Espagne,           (Burgos)(6)

  Hélas! mon Dieu,

  Nous entrâmes dedans l'église

  Pour prier Dieu;

  Les Augustins nous ont montré

  Un grand miracle,

  De voir le Crucifix suer,

  Rien de plus véritable.

 

  11. Quand nous fûmes dedans la ville

  Nommée Léon,

  Nous chantâmes tous ensemble

  Cette chanson;

  Les dames sortoient des maisons

  En abondance,

  Pour voir chanter les pèlerins,

  Les enfants de la France.

 

  12. Quand nous fûmes hors de la ville,

  Près de Saint-Marc,                                       (San Marcos)

  Nous nous assîmes tous ensemble,

  Prés d'une Croix;

  Il y a un chemin à droite,

  Et l'autre à gauche,

  L'un mène à Saint-Salvateur,                         (San Salvador à Oviedo)

  L'autre à Monsieur Saint-Jacques.

 

  13. Quand nous fûmes au Mont-Etuves,       (Col de Pajares vers Oviédo) (6)

  Avions grand froid,

  Ressentîmes si grande froidure,

  Que j'en tremblois;

  A Saint-Salvateur sommes allés,                   (San Salvador à Oviedo)

  Par notre adresse,

  Les reliques nous ont montré,

  Dont nous portons la lettre

 

  14. Quand nous fûmes au Pont qui tremble   ,              (à Navia) (6)

  Bien étonnés,

  De nous voir entre deux montagnes,

  Si oppressés;

  D'ouïr les ondes de la mer

  En grande tourmente,

  Compagnons nous faut cheminer,

  Sans faire demeurance.

 

  15. Quand nous fûmes dans la Galice,

  A Rivedieu,                                                                    (Ribadeo) (6)

  On voulait nous mettre aux Galères,

  Jeunes et vieux;

  Mais nous nous sommes défendus

  De notre langue,

  Avons dit qu'étions Espagnols,

  Et nous sommes de France.

 

  16. Quand nous fûmes à Montjoie,

  Fûmes joyeux,

  De voir une si belle église,

  En ce saint lieu,

  Du glorieux ami de Dieu,

  Monsieur Saint-Jacques,

  Qui nous a tous préservés,

  Durant ce saint voyage.

 

  17. Quand nous fûmes à Saint-Jacques, Grâce à Dieu,

  Nous entrâmes dedans l'église,

  Pour prier Dieu;

  Aussi ce glorieux martyr,

  Monsieur Saint-Jacques,

  Qu'au pays nous puissions retourner,

  Et faire bon voyage.    

 

 

Les pèlerins de cette chanson suivent la voie de Tours. La première localité mentionnée est Saintonge entre Poitiers et Bordeaux. Ils passent par Bayonne (sur la voie de Soulac) puis  par le tunnel San Adrian et poursuivent par le camino Francés qu’ils quittent, pour rejoindre Oviedo (« Quiconque va à Santiago et non au Sauveur, visite le serviteur et quitte le maître ») et ensuite reviennent sur le camino Francés vers Compostelle.

Cette chanson s’est vu adjoindre de nouveaux couplets par des pèlerins.

Dans la chanson dite des « Parisiens » (7) la première strophe dit :

 Nous nous mîmes à cheminer

Droit à Paris pour nous rendre

C’est pour Saintonge passer

Prions Jésus qu’il nous défende

Des ennemis par sa puissance

Ceux qui voudroient par hérésie 

Empêcher nos bons désirs

 

 La chanson des pèlerins dite « des rossignols » ou de « Valenciennes » dit dans une de ses strophes :(8)

  A la seconde journée,

Sur la fresche matinée,

Nous arrivasmes à Paris,

C’estoit feste commandée,

Ce pourquoi messe j’ouis »

 

 Les créateurs de cette chanson partent donc de plus loin que Paris.

 Et certains partent même de Bruxelles(9), le texte de ce couplet s’inspire manifestement du premier couplet de la « grande chanson » :

 

 

Quand nous partîmes de Bruxelles,

Capitale du Brabant

Nous dîmes à revoir à cette ville belle,

Et à tous nos parents;

Au cœur avions si grand désir

D’aller à Saint-Jacques

Nous avions quitté tous nos plaisirs

Pour faire ce voyage

 

  Quand nous partîmes de France,

  En grand désir,

  Nous avons quitté père et mère,

  Trist' et marris;

  Au cœur avions si grand désir,

  D'aller à Saint-Jacques,

  Avons quitté tous nos plaisirs,

  Pour faire ce voyage.

 

 

 

Nos ancêtres nous ont laissé des traces dont nous pouvons être fiers.

 

*

(1)   PÉRICARD-MÉA Denise, Cinq versions de la « Grande chanson » des Pèlerins de Saint-Jacques, en ligne sur le site Saint-Jacques-Info : https://www.saint-jacques.info/gdechansred.html

(2)  Confrérie de Senlis, Guide qu'il faut tenir pour aller au voyage Saint-Jacques en Galice, 1690 cit. in  https://www.saint-jacques.info/gdechansred.html

(3)  SOCARD Alexis, Noëls et Cantiques. Imprimés à Troyes. Depuis le XVIIe siècle jusqu’à nos jour,. A Paris chez Auguste Aubry, éditeur, 1865, pp.75-78, livre numérique téléchargeable au format PDF sur :          https://books.google.be/books?id=qr5IAQAAMAAJ&printsec=frontcover&hl=es&source=gbs_atb#v=onepage&q&f=false

(4)  Par Monsieur l’Abbé PELLEGRIN, L’imitation de Jésus-Christ. Mise en cantique spirituels, Nicolas Le Clerck,  1727 Cit in : Camille DAUX, Les chansons des Pèlerins de Saint-Jacques avec introduction, notes historico-critiques, Edouard Forestié, 1899, p. 57

(5)  De France = de l’Île-de-France, d’après Denise PÉRICARD MÉA

(6)  SOUCHON Christian, Chants du pèlerinage de Saint-Jacques, en ligne sur le site de l’auteur : http://chrsouchon.free.fr/chants/composte.htm

(7)  DAUX Camille, Les chansons des pèlerins de Saint-Jacques. (Paroles et musique) avec introduction, notes critico-historiques, Montauban, 1898, pp. 37-37, (Reproduction numérique au format pdf de l’intégralité de l’ouvrage sur Gallica)

(8)  Ibidem, p.28

(9)  ANONYME, Le Grand cantique du grand voyage des pélerins de Saint-Jacques (en Galice en Espagne.). Mézières: Lelaurin-Martinet.  Cit In : Revista de FilologiaRomanica 2006, vol. 23, p.32. IÑARREA LAS HERAS. Canciones de peregrinos franceses del Camion de Santiago temática y fonctionalidad.        En ligne :          
https://www.researchgate.net/publication/27591815_Canciones_de_peregrinos_franceses_del_Camino_de_Santiago_tematica_y_funcionalidad/

Note : La chanson peut être écoutée sur :     https://verscompostelle.be/Musique/Chansons%20anciennes/

 

mis en ligne le 17/03/2024