balise européenne vers compostelleEST-CE LE CHEMIN OU COMPOSTELLE ET SAINT JACQUES QUI EST IMPORTANT ?

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Article paru dans la revue  "Camino : n° 176

QUAND ON VA EN PÈLERINAGE À COMPOSTELLE, QU’EST-CE QUI EST LE PLUS IMPORTANT :

LE CHEMIN OU COMPOSTELLE ET SAINT JACQUES ?

par Pierre Swalus
pierre.swalus@verscompostelle.be

La question peut être posée car contrairement à d’ autres lieux de pèlerinage, comme Lourdes par exemple où généralement on se rend en train , en avion ou en voiture et où ce qui est important c’est ce qui se passe sur place, pour Compostelle par contre,  le cheminement fait partie intégrante du pèlerinage   . « le aller vers » est très important : le preuve en est que la Compostela n’est attribuée qu’aux pèlerins qui ont au moins marché les 100 derniers km ou parcouru en vélo les 200 derniers. Pour être pèlerins il faut avoir pérégriné…

Pour pas mal de pèlerins vers Compostelle, l’approche du but est d’ailleurs vécue de façon assez ambivalente : souvent avec un certain regret de voir approcher la fin d’une belle aventure faite de rencontres et de moments de partage intense.

L’arrivée même à Compostelle est aussi source de sentiments mélangés : à la joie d’avoir réalisé son rêve, d’avoir pu vaincre les difficultés et les doutes éventuels, d’arriver enfin à ce lieu mythique, se mêle souvent très rapidement une certaine désillusion : désillusion de découvrir la ville grouillante de touristes, le brouhaha d’une foule et d’une ville perpétuellement en fête, le sentiment aussi que la belle aventure vécue avec d’autres pèlerins est finie. D’où aussi la joie ressentie à chaque rencontre de pèlerins précédemment côtoyés et l’envie de figer ces derniers moments de communauté en prenant moult photos de groupes et en faisant la fête ensemble.

Après avoir accompli les quelques gestes rituels : l’entrée dans la cathédrale, l’embrassade de la statue de saint Jacques, éventuellement la messe du pèlerin et bien sûr la quête la Compostela , le pèlerins sent que son pèlerinage est terminé et que quelque chose d’autre commence : l’après pèlerinage…

Beaucoup de pèlerins ne restent d’ailleurs que peu de temps à Compostelle. Rares sont ceux qui prolongent leur séjour au-delà  de 2 ou 3 jours : le pèlerin qui ne se sent plus en pèlerinage, n’a souvent pas tellement envie d’être un simple touriste…

Retour donc à la question i initiale : qu’est  ce qui est le plus important ? Est-ce le chemin ou saint Jacques à Compostelle ?

Faut-il pour qu’on puisse parler réellement pèlerinage que le « pèlerin » accorde la première place à saint Jacques plutôt qu’au chemin et à ce qu’il y a cherché et ou découvert ?

Le père IHIDOY qui a accueilli de 1981 à 2001 des milliers de pèlerins dans son presbytère de Navarrenx, dans une intervention qu’il a faite sur le thème des pèlerins et des randonneurs sur le chemin de Saint-Jacques. brosse de manière succincte une série de portraits de « pèlerins » qu’il a accueillis.

Si les motivations des uns et des autres  sont extrêmement variées, religieuses  parfois mais aussi dans de nombreux cas simplement humaines, il est frappant de constater que dans tous les exemples donnés par le père IHIDOY, il ne cite  pas une seule fois le nom de saint Jacques ou de Compostelle.

La variété des motivations rencontrées l’amène à aborder cette question si souvent posée « Ne faut-il pas distinguer les vrais pèlerins et les faux pèlerins ?

A cette question, il réponds d’abord « Qui peut juger ? »

Puis il apporte un exemple vécu :

« un soir, un jeune couple belge, avec un chien noir, fait halte chez moi. Tous les deux sont chômeurs. Après avoir sympathisé avec eux, et avant d’écrire un petit mot sur leur « Credential » et de le tamponner, je leur demande: qu’est-ce que vous cherchez sur le Chemin?  C’est elle qui me répondit, et je n’oublierai jamais l’expression de son visage en prononçant textuellement ces mots : « Nous cherchons : un peu de force, nous sommes fragiles ; un peu de stabilité, nous n’avons pas de travail… ; un peu d’équilibre, nous avons du mal à gérer notre vie… ».

Il y avait là un autre couple plus ancien, un pasteur protestant et sa femme, médecin. Nos regards se sont croisés, non sans émotion, et celui du pasteur me disait : « Voilà les vrais pèlerins ».

Et le père IHIDOY de conclure :  « Je voudrais tellement qu’on cesse de juger les bons et les mauvais pèlerins. Ce n’est pas de la naïveté ? C’est du réalisme. Permettons à chacun, en faisant le Chemin, de faire son chemin. »(1)

Pour le père IHIDOY, il semble bien que ce soit le chemin et ce qu’il entraîne comme cheminement intérieur qui caractérise le pèlerin vers Compostelle.

Le nombre de pèlerins, qui ayant accompli un premier pèlerinage jusqu’à Compostelle , retourne par la suite marcher sur d’autres chemins de Saint-Jacques mais sans aller jusqu’à Compostelle,  témoigne aussi par là de l’importance première  qu’a la spiritualité vécue sur le chemin dans leur démarche pèlerine.

Pierre GENIN dans la conclusion de son livre(2) rejoint le père Ihidoy lorsqu’il écrit « Si le chemin de Saint-Jacques est un chemin de transformation, laissons les pèlerins vivre leur pèlerinage comme un grand moment de transformation. Ne mettons pas la main sur les pèlerins ! Laissons les être ce qu’ils sont. Faisons pleinement confiance au Chemin qui en profondeur, travaillera le pèlerin ouvert à cette expérience de vie exeptionnelle. »

Remarquons  aussi que en parlant du «chemin de Saint-Jacques » et non du "chemin vers saint Jacques", l’’accent est bien mis par l’auteur sur le cheminement et non sur l’aboutissement final du pèlerinage.

Nous pourrions conclure avec le même auteur  que Compostelle n’est pour le pèlerin « qu’un prétexte pour se mettre en route ‘ » et que « le pèlerinage se vit essentiellement sur le Chemin et non à l’arrivée »(3) et répondre ainsi à notre question initiale.

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(1) IHIDOY Sébastien, Le devoir et le privilège d’accueillir, Revue Le Bourdon, 1996-97, n° 11, pp. 3-4

(2) GENIN Pierre, Pèlerin de Saint-Jacques, lève-toi et marche, Edition Mois, 2006, p.320

(3) GENIN Pierre, Ib. p. 180


Quelques commentaires reçus sur facebook ou ailleurs

B.Q : Non,  la Marche et le corps ébranlé par elle et la mémoire d'avant l'Histoire qui offre un présent

D.B : Dans le monde individualiste qui nous entoure Compostelle est une bouée de sauvetage et une bouffée d'air pur.
C'est ce qui nous lie à jamais au chemin.

F.H. : Pour moi aussi le cheminement intérieur est la vraie démarche pèlerine avec nos référents, suivant notre éducation, notre situation sociale actuelle, nos relations familiales, nos accidents de la vie.  Huit heures par jour en marchant permet de réfléchir à ce que l’on est, de ce que l’on veut ˝réparer˝, de ce que l’on veut poursuivre, en un mot de ce que l’on veut VIVRE dans le futur

G.D : Nous sommes allés pour rencontrer Saint-Jacques et nous nous sommes retrouvés sur la route de Damas. Un ami espagnol est allé sur la route et a trouvé les pauvres. Le chemin accomplit toujours des choses extraordinaires

G.R : La marche, les rencontres, les paysages, les chapelles, le mystique, l'effort, le dépassement de soi, tout à la fois ! Et quand on y prend goût on ne peut plus s'en passer, il faut repartir..

J.S i : Ils sont tous les trois importants et l’influence de l’un agit sur les 2 autres .....Mais ....ce qui compte le plus .... C’est le volonté de vouloir se laisser influencer par les trois .... humer l’odeur des fleurs ...écouter tout ce qui gravite autour de nous ....apprendre l’histoire de ceux qui nous ont précédés ....et laisser une idée de ce que nous ressentons ....après l’avoir fait ....en ce qui me concerne ....il y a un avant et un après ....car ...j ai voulu en capter la quintessence chaque jour ....et je ne suis pas déçu ...je n’ arrête pas d’en parler ....d’y penser ...seul ...en faisant défiler ces milliers de photos que je n ai pas pu prendre ....allez y les gars ....les filles ....d’un coup ou en tranches ....mais n’abandonnez jamais ....c’est une démarche strictement perso ....et je prierai pour que vous soyez au parfum ....et nous serons heureux .....Et nous serons heureux .......

M.L : Un chemin de vie et de renaissance, sortir de soi, aller à la rencontre de l'autre (le Tout-Autre).

M.L : Bel article ! J'en rejoins totalement les conclusions. Pour beaucoup de pèlerins côtoyés et pour moi-même, l'important c'est le chemin....Nous n'avons pas à juger de la façon dont les autres le font. Et ça, c'est parfois un sacré exercice d'humilité !!!

M.L : Un chemin de vie et de renaissance, sortir de soi, aller à la rencontre de l'autre (le Tout-Autre).

P.C : En ce qui me concerne, c'est incontestablement, le chemin qui nous arrache a notre quotidien, nous dépouille petit a petit de nos certitudes, nous oblige a regarder l'autre tel qu'il est et non tel que l'on voudrait qu'il soit, nous coupe de ce qui pouvait nous rassurer pour nous faire apprécier le moment présent en nous reconnectant avec notre environnement. La prise de conscience de ce que nous sommes réellement.

S.D : La réponse est effectivement la question, le présent n'étant que le but paradoxalement ! La fin est un moyen d'y arriver

S.S : Tout à fait..  très vite on regrette d’ être arrivée et là on découvre l’importance du chemin.. des jours seul ou avec des autres... le ressenti est énorme. ..Très difficile de quitter cette ambiance

T.A : Pour moi c est un regret de voir approcher la fin d’une belle aventure faite de belles rencontres. Le retour a la maison et très difficile de quitter cette ambiance

V.L : Pour moi, l'important est le chemin, les rencontres, le partage

P.B. : On entend souvent dire sur le Camino, et en particulier en arrivant à Compostelle : "l'important c'est le chemin
.Pour moi, le chemin permet d'arriver au sanctuaire et, si tout au long des kilomètres, j'ai enchainé les prières, si je me suis arrêté dans la plupart des églises du chemin pour y prier saint Jacques, alors en arrivant dans la crypte, je ressens un accomplissement et une grande joie intérieure.
Le chemin a été un moyen extraordinaire pour les rencontres de tous mes prochains mais le plus important a été la démarche de foi qui m'a "animé" tout au long de ces jours, la reconnaissance de la chance de pouvoir marcher et de rendre grâce à Dieu de m'avoir "mis" sur ce chemin.
J'aurais envie de dire : l'arrivée à la cathédrale est un peu comme l'entrée dans une...auberge espagnole !  c'est à dire que tu reçois à la mesure de ce que tu apportes.
Si tu est resté randonneur, le botafumeiro sera ton cadeau
Si le chemin t'a transformé, tu seras comblé et tu continueras ta marche vers Dieu.

mis en ligne le 11/01/2017