QUELQUES RÉFLEXIONS SUR LA GRANDE RANDONNÉES

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Le texte qui suit, est constitué de larges extraits de l'article "Quelques réflexions sur la grande randonnée en autonomie" publié sous la plume de Léon Lambiet dans la revue "GR INFOS sentiers", n° 159, été 2003.

Il a été choisi parce qu'il reflète très bien ce que ma femme et moi (et probablement beaucoup d'autres randonneurs encore) aiment dans la randonnée.

Merci à l'auteur d'avoir aussi bien exprimé ce qu'est la randonnée.

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Randonner ce n'est pas abattre le plus de kilomètres possible à la journée. Nous laissons cela aux accros de la performance. Randonner ce n'est pas seulement atteindre un but en un nombre de jours donné. Randonner c'est avant tout, une démarche, une disponibilité de l'esprit.

Comme on élimine de son sac à dos tout poids inutile, quand on commence une grande randonnée, on se débarrasse au maximum de ses obligations habituelles. Comme son matériel, on réduit ses besoins au minimum vital. Avoir de quoi combattre la chaleur, la pluie ou le froid.. Avoir de quoi apaiser sa faim et sa soif. Avoir l'équipement ad hoc pour marcher longtemps et dans le confort. Et surtout, avoir avec soi une petite tente qui permettra une totale liberté de mouvement. Rien de tel pour réapprendre à savourer intensément les petites choses de la vie qui prennent de ce fait une dimension nouvelle : la petite tasse de café que nous nous chauffons le long du chemin à la pause, la sieste que nous nous gréons à midi avant de reprendre la route, les quelques minutes que nous nous accordons dans la fraîcheur d'une antique chapelle, les coloris des sous-bois de feuillus  qui nous éblouissent à l'automne, le chamois qui continue à brouter, à quelques dizaines de mètres du sentier, sans lever le museau à notre passage, le bonheur que rencontrer un  ruisseau par une journée de canicule peut représenter, la sensation de plénitude qui s'empare de nous après une journée bien remplie et une fois la tente dressée, quand nous nous relaxons devant un paysage de montagne qui s'étale presque à l'infini dans toute sa majesté et sa pureté première ! Et ne parlons pas de l'étonnante limpidité du ciel et de l'intensité des étoiles, la nuit à plus de 2000 mètres d'altitude. La vie elle-même prend un sens différent. 

«Itinérer» c'est en quelque sorte retrouver une liberté, dont le monde moderne, fait de contraintes, nous prive trop souvent. En randonnée, on retrouve une disponibilité pour l'imprévu, l'inattendu, le coup de cœur. On se met dans un état de réceptivité. On est prêt à tout instant à 'flasher' sur un beau paysage, à s'attarder devant un spectacle naturel ou culturel. On se sent ouvert. On peut prendre le temps de parler avec les gens quand on en rencontre, d'observer des animaux, de faire un détour quand l'occasion se présente. 

La notion même du temps contraignant, stressant, imposant des délais, se modifie. «Allah nous a donné le temps, mais il n'a rien dit de la hâte», dit un proverbe touareg ! On peut à nouveau avoir, se laisser, prendre, le temps. Le but de la randonnée, l'itinéraire, le Gr lui-même, peuvent devenir accessoires, perdre de leur caractère impératif. Qu'est-ce qui nous empêche de modifier notre itinéraire, de perdre notre sentier pour le retrouver un peu plus tard, d'écourter ou d'allonger ? Est-ce si grave de ne pas aboutir à l'étape prévue ?

en randonnée dans l'Aubrac

  La randonnée ... / ... rétablit le contact entre nous et la nature, parfois même une nature presque sauvage où les traces de l'homme se font très discrètes. Dans cette « sauvagerie », que d'autres appelleront « authenticité » (heureusement ces régions préservées sont encore très nombreuses en France et ailleurs en Europe - par contre, elles ont hélas presque disparu en Belgique-), il est possible de goûter à nouveau le silence et la solitude, de se débarrasser de cette gangue de bruit de fond qui nous colle à la peau dans nos milieux urbains, d'oser marcher, être, seul(s) sans crainte ni oppression, en quelque sorte de se retrouver ! Mais surtout ce n'est qu'en marchant, ce n'est que grâce à la lenteur de ce mode de déplacement qu'on peut véritablement s'imprégner de la beauté de cette nature « revisitée », qu'on peut vibrer et savourer pleinement cette émotion toute sensuelle. Et ainsi, randonner c'est aussi ressentir profondément notre appartenance au milieu qui nous entoure ! Enfin, est-il exagéré de dire que, quand nos sentiers nous font pénétrer au plus profond de la forêt, ce quelque chose de mystérieux qui fait de la forêt un élément constitutif de l'inconscient populaire, ce quelque chose d'indéfinissable devient presque palpable ? 

Randonner de cette façon, c'est aussi la porte ouverte aux rencontres, fortuites la plupart du temps, mais ô combien enrichissantes. .../...

 Bien sûr, nous ne traversons pas leurs villages comme des zombies l'œil rivé sur notre podo ou comme des touristes uniquement préoccupés de photos. Nous préférons le regard direct au regard différé. Nous ne nous sentons pas non plus obligés d'observer les gens du cru avec des airs d'anthropologues ou d'entomologistes. ! 

Quel randonneur n'a pas connu cette délicieuse sensation de bien-être qui s'empare du corps, lorsque, après quelques kilomètres de marche, la lourdeur du sac s'évanouit, les jambes semblent avancer sans peine, sans qu'on les perçoive encore. Et quand la mécanique est à son couple optimal, l'esprit se vide progressivement, l'être tout entier entre dans une sorte d'état second. Marcher n'est-ce pas pratiquer le plus efficace des zen ? 

Autre sensation agréable que la grande randonnée en autonomie permet d'expérimenter : ne dépendre de personne, pouvoir se passer pendant sept, dix jours ou plus, de voiture, de télévision, de téléphone portable, etc., de tout ce confort douillet et de cette dépendance dans laquelle la technologie moderne nous enferme.

Bien sûr, il ne faut pas verser dans un angélisme béat. Je dois à la vérité d'avouer qu'en randonnée il nous arrive de trouver le sac à dos(trop) lourd, de sentir que nos jambes s'appesantissent. Sous une pluie battante et prolongée, nos mines ont tendance à s'allonger et notre belle humeur à virer au sombre. En un mot, la randonnée connaît aussi ses moments pénibles, voire désagréables. Mais ils sont vite oubliés. Mieux encore, ils nous procurent parfois même, a posteriori, un sentiment de satisfaction : c'était dur, mais nous avons été capables de surmonter les difficultés ! 

.../... On the road again 

Léon LAMBIET (février 2002).

 

 le 3/12/2003

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